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LA guerre continuait, les combats faisaient rage. Il y eut des batailles meurtrières, entre Allemands et Canadiens, sur la crête de Vimy. Cela nous toucha à peine, ma mère et moi. Notre détresse nous isolait du monde extérieur. La guerre nous avait pris ce que nous avions de plus cher. Comment aurait-elle pu encore nous atteindre ?
Peu de temps après, Charles m’annonça qu’il partait, lui aussi. Il s’était engagé.
— Tu comprends, me dit-il, j’en ai assez de travailler pour les Allemands, d’extraire du charbon qu’ils utiliseront contre notre pays. J’ai bientôt dix-neuf ans, je veux me rendre utile, je vais me battre aux côtés des Français, là où est ma place.
Je ne vis qu’une chose : il partait, et la guerre se chargerait de le tuer, comme elle le faisait pour tous les autres. J’ai tendu les mains vers lui, en un geste de supplication :
— Oh, Charles ! Ne fais pas ça ! Tu n’es pas obligé de partir, ne t’en va pas…
Il me regarda, avec un mélange d’étonnement et de reproche :
— Voyons, Madeleine, essaie de comprendre. Je veux faire mon devoir. Tu admettrais que je continue à travailler pour les Allemands, au lieu de me battre pour la France ?
— C’est… c’est moins dangereux…
Il haussa les épaules, d’un air méprisant :
— Ne dis pas des choses pareilles… De toute façon, ma décision est prise. Je me suis engagé, je pars.
— Et tes parents, que disent-ils ?
— Ma mère est comme toi, elle voudrait me garder, au risque de faire de moi un lâche. Mon père, lui, me comprend et m’approuve. Il est assez malheureux de ne pouvoir aller se battre, et de rester ici. Tu ne sais pas ce que c’est, Madeleine, que de travailler pour « eux ».
Non, je ne savais pas ce que c’était. Et je ne pouvais pas comprendre, non plus, cet acharnement à vouloir partir pour se faire tuer. Je l’ai regardé, muette soudain, consciente du fait que nous ne voyions pas les choses sous le même angle, et obligée, encore une fois – une fois de plus –, d’accepter, de subir.
Il partit, quelques jours plus tard. Il vint nous dire au revoir, à ma mère et à moi – ou était-ce adieu ? Il portait la tenue de soldat, ce qui lui donnait un air viril. Il m’embrassa comme un frère, me serrant contre lui. Je sentis sa joue contre la mienne, dure, rugueuse, et je compris qu’il était devenu un homme. Les larmes aux yeux, je l’ai regardé partir, en luttant contre la pensée qui me disait que je ne le reverrais plus, que, comme mon père, lui non plus ne reviendrait pas.
*
Charles parti, il ne restait que Pierre, son père, pour nous aider dans les gros travaux. À la maison, je faisais pratiquement tout moi-même, maintenant. Ma mère se traînait lamentablement, on eût dit une pitoyable marionnette brisée. La mort de mon père l’avait gravement atteinte. Moi aussi, j’avais une peine immense, qui me donnait parfois envie de hurler, tellement c’était insupportable. Mais je comprenais que, pour ma mère, c’était autre chose. Elle jusqu’alors si active, si dynamique, ne faisait plus rien. Elle avait un regard lointain, qui regardait sans voir, et qui semblait tourné vers l’intérieur, uniquement occupé de sa propre douleur.
Je me confiais à Marie, je lui disais le souci que me causait ma mère. Jeanne, bien souvent, soupirait, et disait :
— Tu ne peux rien faire, ma pauvre Madeleine. Il faut attendre, avoir de la patience. Avec le temps, sa peine sera moins vive.
Juliette, que je voyais plus rarement depuis la guerre, avait compris, elle aussi, mon problème.
— Entoure-la le plus possible de tendresse, me dit-elle. Maintenant, elle n’a plus que toi. C’est toi qui dois la ramener vers la vie.
Mais cela me semblait bien dur. J’étais trop jeune pour une telle épreuve, et moi aussi, j’avais de la peine, moi aussi, j’aurais eu besoin d’être consolée.
Le jour de mes dix-huit ans, je pleurai. Ma mère mêla ses larmes aux miennes :
— Jamais plus, Madeleine, il ne sera là pour te souhaiter ton anniversaire…
Notre souffrance commune nous a rapprochées. À partir de ce jour, nous avons pu parler de mon père, et nos conversations le faisaient revivre. Sur le buffet de la cuisine, ma mère installa sa photo, devant laquelle elle mit un bouquet de fleurs.
Et sur tout cela, il y avait la guerre qui continuait. Cette année-là, les bombardements furent encore plus nombreux et plus violents. Nous avions fini par installer des matelas dans la cave, car nous y passions, de plus en plus souvent, des nuits entières. C’était le plus pénible, je l’ai déjà dit. Julien et Georges, les deux plus jeunes frères de Marie, qui n’étaient encore que des enfants, pleuraient de peur. Quant à nous, ce n’était pas non plus uniquement l’obscurité et le froid qui nous faisaient frissonner.
Ces bombardements durèrent tout le printemps, puis, au début de l’été, diminuèrent d’intensité. Au mois d’août, les Allemands commencèrent à reculer, les villes occupées jusque-là furent libérées. Nous osions à peine espérer. Qu’allait-il se passer ?…
Au mois de septembre, il y eut encore quelques bombardements. Mais ce furent les derniers. À l’époque, nous ne le savions pas et nous étions, une fois de plus, terrés dans la cave, la peur au ventre. Le petit Georges, à la suite de ces nuits passées dans l’humidité, avait attrapé un refroidissement et toussait. Le lendemain, il avait une forte fièvre et était couché.
J’allai le voir. Il était très rouge, et ne semblait pas nous reconnaître. Marie, qui l’aimait beaucoup, ne quittait pas son chevet :
— Oh, Madeleine, me dit-elle, je suis inquiète. Si ça continue, nous allons appeler le médecin.
Le lendemain, ma mère, à son tour, se plaignit de maux de tête, de frissons, de vertiges. À la fin de l’après-midi, elle avait le teint gris et ne tenait plus debout. Je la forçai à se coucher. Elle me parut avoir beaucoup de fièvre. Toute la nuit, elle toussa, et le matin elle fut incapable de se lever.
Je courus chez Marie.
— Marie, si tu fais venir le docteur pour ton frère, envoie-le chez moi. Ma mère est malade aussi.
Rentrée chez moi, je ne savais que faire. Je fis boire à ma mère un peu d’eau. Avec terreur, je me rendis compte qu’elle ne me reconnaissait plus. Elle délirait, elle appelait mon père :
— Jean ! Où es-tu ? Viens !
Elle me repoussait quand je m’approchais d’elle. Elle me disait :
— Qui es-tu, toi ? Ce n’est pas toi que je veux, c’est Jean. Pourquoi ne vient-il pas ?
Lorsque le docteur arriva, je n’en pouvais plus. Il ausculta ma mère, prit sa température – elle avait quarante et un degrés – et regarda dans sa gorge.
— Oui, c’est encore un cas de cette maudite épidémie qui vient de se déclarer ; beaucoup sont déjà atteints.
Il se tourna vers moi :
— Tu es seule pour la soigner ?
— Oui. S’il le faut, j’irai chercher Jeanne, ou Marie.
Il nous connaissait bien, et ne fit pas d’objection. Il me donna une potion, à administrer toutes les deux heures.
— Surtout, me dit-il, il faut essayer de faire tomber la fièvre. Tu lui mettras des linges humides sur le front, à changer dès qu’ils ne seront plus froids.
Je le remerciai. Il partit, appelé ailleurs par d’autres malades, et je restai seule.
Je fis tremper des mouchoirs dans de l’eau fraîche, je les tordis et en fis des compresses, que je posai sur le front de ma mère. Elle avait les yeux fermés et était maintenant très rouge. La fièvre ne baissait pas. J’étais très inquiète. C’était la première fois que je la voyais malade, et je me sentais impuissante et démunie. Toute la nuit, je la veillai, assise dans le fauteuil près du lit. Je somnolais par moments, et j’étais réveillée par un gémissement ou une quinte de toux. Je lui donnai régulièrement sa potion, changeai les compresses qui, après quelques minutes de contact avec son front, devenaient sèches et brûlantes. Que pouvais-je faire d’autre ?
Le lendemain, Jeanne vint me voir. Elle m’aida à renouveler le lit et à changer ma mère, car elle avait tellement transpiré que sa chemise, l’oreiller et le drap étaient trempés.
— C’est bon signe, dit Jeanne, elle élimine le mal.
— Et Georges, comment va-t-il ?
Elle eut une moue inquiète :
— Pas beaucoup mieux. Il avait déjà, depuis plusieurs jours, un gros rhume. Il a encore beaucoup de fièvre…
Elle m’aida à mettre un peu d’ordre dans la maison, mais ne s’attarda pas. Son enfant avait besoin d’elle.
— Ça ira, Madeleine, tu te débrouilleras ?
— Oui, merci, ne vous inquiétez pas.
— Si tu as besoin de quoi que ce soit, viens nous chercher, ou frappe au mur, nous viendrons.
A midi, je mangeai un morceau de pain, puis je m’installai dans le fauteuil. Ma mère reposait, plus calme semblait-il. La fatigue eut raison de moi, et je m’endormis.
Lorsque je m’éveillai, j’eus la joie de voir que ma mère avait les yeux ouverts. Sa fièvre semblait avoir baissé. Je sautai sur mes pieds :
— Maman, comment vas-tu ? As-tu mal ?
— J’ai encore un peu mal à la tête, et à la gorge…
— C’est l’heure de ta potion.
Je la lui donnai, heureuse de voir qu’elle me reconnaissait, qu’elle allait mieux. Le docteur arriva à ce moment-là, trouva, lui aussi, une amélioration, et dit de continuer la potion jusqu’à sa prochaine visite.
Mais, dans la nuit, la fièvre revint. Ma mère se remit à délirer, appelant mon père de nouveau, et moi-même. Elle criait :
— Madeleine ! Madeleine ! Où es-tu ? Pourquoi ne réponds-tu pas ?
Je m’approchai du lit, inquiète :
— Je suis là, maman, je suis là.
— Qui es-tu ? C’est Madeleine que je veux.
— Mais c’est moi, maman, je suis Madeleine.
De nouveau, elle me repoussait :
— Tu n’es pas Madeleine. Où est Madeleine ? Va la chercher, je veux la voir.
Si j’insistais, elle se débattait. Elle me faisait peur, j’étais dépassée par cette maladie qui changeait ma mère en une étrangère qui ne me reconnaissait pas. J’ai pleuré, cette nuit-là, au chevet de ma mère, de solitude et d’impuissance. C’était trop, je n’en pouvais plus. N’avait-il pas suffi que mon père fût mort, déjà ?
A l’aube, elle reposait plus calmement. Épuisée, je dormis quelques heures. Dans la matinée, Antoinette, l’une de nos voisines, qui avait appris par Jeanne la maladie de ma mère, vint nous voir. Elle m’aida à faire le ménage, puis à laver ma mère quand celle-ci fut réveillée. J’étais allée vider la cuvette d’eau sale et je revenais dans la cuisine lorsque j’entendis ma mère qui disait :
— Si je pouvais mourir, je le rejoindrais, tu comprends…
Volontairement bourrue, Antoinette la rabroua :
— Louise, tu n’as pas le droit de dire une chose pareille ! Pense à ta fille, tu dois vivre pour elle. Que deviendrait-elle, la pauvrette ?
Je reçus un coup au cœur. D’apprendre, d’abord, que ma mère souhaitait mourir, de réaliser, ensuite, que sans elle je n’aurais plus rien. Alors j’eus peur.
Antoinette partit, puis, vers midi, Jeanne m’apporta à manger, mais je n’avais pas faim. Elle m’apprit que Marie ne quittait pas le chevet de Georges, qui n’allait toujours pas mieux.
Ma mère passa l’après-midi à dormir, et, le soir, lorsque le docteur revint, il la trouva mieux. Elle n’avait plus de fièvre, mais se sentait extrêmement faible.
— C’est normal, lui dit-il. Il faut maintenant reprendre des forces.
Il donna un sirop de vitamines, à cet effet, et me dit, alors que je le reconduisais à la porte :
— Elle est sauvée, je pense. Tant mieux, j’en suis heureux pour toi, Madeleine. Cette maladie est mortelle, elle fait beaucoup de victimes.
Cette nuit-là, ma mère dormit calmement. Pour la première fois depuis sa maladie, je pus prendre une nuit de vrai repos.
Les jours suivants, elle se leva, mais resta complètement anéantie, sans réaction.
— C’est normal, disait le médecin, à qui je faisais part de mon inquiétude. Il y a une asthénie intense qui se prolonge après la guérison.
Mais moi, j’avais peur-Je voyais bien que ma mère ne reprenait pas goût à la vie, et je me souvenais des paroles qu’elle avait dites à Antoinette. Au bout de quelques jours, la voyant toujours pareille, pâle et donnant l’impression de se laisser couler, je ne pus retenir mes larmes. Elle était assise, près du feu, et restait là, des journées entières, les mains croisées sur les genoux, les yeux vagues, regardant droit devant elle, dans le vide.
Je m’approchai, m’agenouillai près d’elle. J’appelai, doucement :
— Maman…
Elle tourna son regard vers moi, avec une sorte de surprise douloureuse :
— Madeleine ! Tu pleures ?
Alors j’ai sangloté, longuement, éperdument. Et, entre mes sanglots, j’essayai de lui parler, de lui expliquer que j’avais besoin d’elle, qu’elle ne devait pas me laisser, qu’elle devait revenir avec moi, parce que c’était déjà assez dur pour moi de n’avoir plus mon père. Je ne sais plus tout ce que j’ai dit, mais mon cri était désespéré :
— Ne pars pas ! Reste avec moi, j’ai tant besoin de toi !
Quand j’ai levé les yeux vers elle, j’ai vu qu’elle pleurait. Les larmes coulaient sur son visage, et semblaient purifier son regard. Il me parut plus clair, il n’était plus tourné vers sa propre souffrance, il semblait délivré d’une obsession. Elle me caressa les cheveux, et murmura, comme pour elle-même :
— Pauvre, pauvre enfant ! Enfermée dans ma détresse, je ne me rendais pas compte. Oui, tu as raison, je ne peux pas te laisser. Jean m’attendra un peu plus longtemps, il comprendra.
Elle me prit contre elle, je la serrai dans mes bras. Et les larmes que nous avons versées ont emmené avec elles tout un monde de destruction et de douleur pour ne laisser que notre amour intact, nous liant l’une à l’autre plus étroitement que jamais.
*
A partir de ce jour, elle réagit beaucoup mieux, elle se remit à vivre. J’avais eu si peur de la perdre que chacun de mes gestes envers elle ressemblait à une action de grâces. Je veillais à lui éviter toute fatigue, et nous avons puisé dans notre amour mutuel la force de vivre avec l’absence définitive de mon père.
Georges avait été longtemps malade. Je lui rendis visite. Il allait mieux, mais, comme ma mère, semblait très faible. Marie, qui s’était épuisée à le soigner, me dit :
— Je le sauverai, je ne le laisserai pas mourir. Je lui donnerai mes forces, s’il le faut. Sais-tu, Madeleine, que, quand il avait beaucoup de fièvre, je me suis couchée contre lui pour lui prendre son mal ?
Je ne savais que répondre, devant tant d’abnégation. Marie avait un don de sacrifice que je ne possédais pas. Je la regardai et lui trouvai le teint plombé, les yeux ; cernés, les traits tirés de fatigue et d’épuisement.
Le lendemain, j’appris sans surprise qu’à son tour elle était malade. Je croisai le médecin alors qu’il sortait de chez elle. Je l’interrogeai. Il baissa la tête, embarrassé :
— Elle est très atteinte… Elle ne semble plus avoir de forces à opposer à la maladie, elle les a usées à soigner son frère.
— Elle va guérir, quand même ?
— Je ne peux rien dire. C’est en ce moment que la maladie est la plus violente.
Je savais que c’était vrai. Des gens mouraient chaque jour, et ces derniers jours il y avait eu encore plus de victimes. C’était une épidémie d’une ampleur qu’on n’avait jamais vue. Elle était d’autant plus virulente qu’elle s’attaquait à des personnes dont l’organisme ; était affaibli par les rigueurs de la guerre. J’ai su, par la suite, que cette maladie, qui fut appelée grippe espagnole, fit plus de victimes civiles en quelques mois que la guerre en quatre ans. Si bien que rares furent les foyers qui n’eurent pas à déplorer un décès, causé soit par la guerre, soit par la maladie.
Dans les jours qui suivirent, cependant, l’épidémie, après avoir été plus meurtrière que jamais, sembla régresser. Il n’y eut plus de nouveaux malades. Et, parmi ceux qui étaient atteints, il y eut moins de décès.
J’allai voir Marie. La fièvre l’avait minée. Elle avait un petit visage, translucide, amenuisé. Elle était si faible qu’elle pouvait à peine parler. Elle me tendit une main tremblante :
— Madeleine…
Voir Marie, habituellement vive comme un oiseau, réduite à un tel état de faiblesse était plus que je n’en pouvais supporter.
— Guéris vite, Marie…
Elle dit, dans un souffle :
— Je n’en aurai pas la force. Mais ne sois pas triste, Madeleine. Je donne ma vie sans regrets pourvu que vive Georges.
A ce moment, je me suis rappelé la phrase que nous disait souvent M. le Curé : « Il n’y a pas de plus grande preuve d’amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. » Alors je n’ai pas pu résister. Je me suis penchée vers Marie, je l’ai embrassée, et, ma joue contre la sienne, j’ai pleuré, sans pouvoir m’arrêter.
Marie fut la dernière victime de l’épidémie. Après elle, il n’y eut plus de décès. Elle mourut, mon amie Marie, pour avoir voulu sauver son petit frère. Sa mort m’a causé un chagrin immense. C’était, avec elle, toute une partie de mon enfance qui s’en allait. Je revoyais, pêle-mêle, nos jeux, sa présence près de moi, à l’école, je me rappelais son amitié, sa loyauté, sa gentillesse. Elle aussi, elle m’était ravie, et la blessure de mon cœur qui saignait depuis la mort de mon père se rouvrit et saigna davantage.
Lorsque, le 11 novembre, l’armistice fut signé, la nouvelle ne nous causa pas la joie tant attendue. Les sirènes se mirent à retentir, et ce n’était pas, cette fois, dans l’annonce d’un bombardement ou d’une alerte. Les cloches de l’église sonnèrent joyeusement, et des drapeaux fleurirent un peu partout.
Mais nous, nous ne pouvions pas nous réjouir. Marie venait de mourir. Mon père ne reviendrait jamais à la maison. Ma mère et moi, debout sur le seuil, nous avons écouté le message de paix des sirènes, nous avons regardé les gens s’embrasser et chanter La Marseillaise, et nous sommes restées là, serrées l’une contre l’autre, à la fois soulagées et meurtries, le cœur lourd, les larmes aux yeux.